Les premières précautions

Devant louer la maison mais étant à 10.000 km, décision est également prise d’avoir recours à une agence immobilière pour assurer la gestion complète de la maison : Trouver les locataires, gérer les petits travaux, collecter les loyers, etc… D’une nature ceinture et bretelle, l’agence contracte également en notre nom une assurance pour loyers impayés. Nous partons l’esprit libre et serein. Tout est sous contrôle !

Les trois premières années

Nous avions bien raison ! Deux locataires se succèdent durant les trois premières années, sans complications particulières, si ce n’est le sport favori des locataires français en fin de bail, c’est‐à‐dire le non‐paiement du dernier mois de loyer afin d’éviter à avoir à dépenser une partie de la caution. C’est interdit me direz‐vous… certes, mais il semble que les français s’accommodent parfois des règles sans en être inquiétés outre mesure…

« Il est charmant ! »

Après neuf mois de vacance locative, de nouveaux locataires font leur entrée. « Il est charmant » me dira l’agence. Un père à la retraite, sa fille et son gendre sont tous trois co‐prenneurs, avec des revenus suffisants.

Le début des problèmes…

Après deux mois de location, les premiers signes de difficulté apparaissent. Les locataires se plaignent de fenêtres trop vieilles… De bonnes composition, malgré leur accord de prise de location en l’état, nous faisons remplacer plusieurs fenêtres et portes‐fenêtres. Puis ils commencent à lister de nombreux soi‐disant problèmes et refusent de payer le loyer d’Octobre tant que les problèmes ne seront pas résolus. Discussions, emails, courriers, rien n’y fait. Le premier faux fait son apparition : Les locataires font effectuer un devis à notre nom à notre insu pour le remplacement d’une énième porte‐fenêtre et nous reprochent ensuite de leur avoir promis le changement sans l’avoir réalisé… En passant, les insultes, attaques verbales et menaces font leur entrée. Les honoraires d’agence ne seront jamais payés.

Le temps, inutile, des compromis

Première façon de gagner du temps pour un escroc : parlementer, discuter, promettre sans tenir, faire durer… Cela retarde le début des procédures et les locataires gagneront ainsi presque 6 mois.

Le temps de la désillusion

Voici venu le temps de la désillusion. Le « sale » propriétaire qui sommeille en nous entame les actions à regret. Trop bon, trop c… Puis découverte des fausses ou mauvaises déclarations auprès de l’assurance des loyers impayés qui se dépêche de qualifier l’assurance de nulle et non‐avenue pour se dédouaner d’un cas supplémentaire. Zut alors ! Nous voilà seuls et inexpérimentés face à un escroc qui connait absolument tous les textes de loi et manie les menaces et les recours avec brio. Nous découvrons alors le passé de nos locataires : Escroquerie, Fraude fiscale, Abus de biens sociaux, Faux, Abus de confiance, Travail clandestin, Fausse lettre de change, Détournement de véhicules, Sociétés multiples avec prête‐noms, Multiples actions judiciaires en cours, Condamné à la faillite personnelle depuis 1986, Interdiction de gérer à vie depuis 1986, Condamné à 1 an de prison ferme en 1999, Condamné à 3 ans de prison ferme en 2000, Mis en examen pour escroquerie et en détention provisoire en 2010, Condamné à restituer des fonds en 2010, A nouveau condamné à la faillite personnelle pour 15 ans en 2014, Multiple liquidations judiciaires… Ce n’est pas gagné…

Les arcanes impénétrables de la Justice

Eloigné de 10,000 km, il faut donc choisir un avocat puis entamer la longue, très longue, course d’endurance de l’expulsion… Et là, on en apprend beaucoup sur les lois sensées protéger les innocents (mais utilisées et détournées à 95%  par les escrocs). Seule frustration, c’est que ce n’est qu’au fur et à mesure… En effet, un avocat ne renseigne pas son client de manière proactive, et ne répond ni par oui ni par non à une question… Normalement, cela devrait, peut‐être, sait‐on jamais, il faut voir, à suivre, cela dépend… Voici les étapes (qui totalisent déjà 20 mois quasi‐incompressibles) :

1) Lettre d’huissier ‐ Commandement de payer (Attendre 2 mois obligatoires)

2) Demande d’audience au tribunal d’instance (Dans notre cas, 6 mois plus tard)

3) Demande d’aide juridictionnelle par les locataires la veille de l’audience (Sera refusée par la suite, mais ce n’est pas grave car c’était juste pour repousser l’audience…) (Dans notre cas, 4 mois plus tard)

4) Audience ou le juge donnera un délai de paiement plus élevé que ce que le locataire prétendra lui‐même pouvoir honorer !

5) Délibération du juge (Dans notre cas, 2 mois)

6) Retard de délibération pour surcharge de travail (Dans notre cas, 1 mois)

7) Notification par huissier de la signification du jugement (1 mois avant que le jugement prenne effet)

8) Suite au non‐paiement (tiens, c’est curieux çà !), envoi par huissier d’un Commandement de quitter les lieux (Attendre 2 mois obligatoires)

9) Procès‐verbal de tentative d’expulsion par huissier (1 mois)

10)Demande de recours aux forces de police à la Préfecture par huissier (Dans notre cas, 15 jours ‐ exceptionnel m’a‐t‐on dit… tiens, un peu de chance pour une fois… Cela prouve que mes locataires sont VIP à la Préfecture – Il n’est pas rare de devoir attendre de nombreux mois)

11) Prise de RdV avec les forces de police, le déménageur et le serrurier pour l’expulsion (Dans notre cas, 15 jours)

Et il y avait tellement d’autres possibilités de recours et actions comme des appels, des paiements partiels, des refus de Préfecture, etc… Bref, chaque cas est unique, mais chaque cas sera long, imprévisible et pénible.

Paye et tais‐toi !

Non seulement faut‐il s’accommoder du non‐paiement des loyers (dette locative), mais il faut également cracher à tous les bassinets pendant plusieurs années : Frais d’avocat, Frais d’huissier, Frais de serrurier… et, plus étonnant, Frais de gendarmerie, Frais de SPA, Frais de déménagement, Frais de garde‐meubles ! Et oui, il faut payer le déménagement de ses locataires et leur gardemeuble, un comble ! D’une manière ironique, mes locataires ayant également indiqué que certains meubles (meubles de Salle de bain accrochés au mur, four, machine à laver, dressing…) leur appartenaient (alors qu’ils nous appartenaient), nous avons donc nous‐même payé un huissier, un serrurier, un déménageur et des gendarmes pour venir voler nos propres meubles afin de les déménager et les offrir à nos locataires… Paye et tais‐toi, j’ai dit !

Le temps de la reconstruction

Découverte de la maison saccagée, des radiateurs arrachés ou disparus, des immondices et des dégâts des eaux à tous les étages. Frais de nettoyage puis de remise en état à prévoir. Niveaux de stress maximum tout au long des étapes, vie de famille détériorée, vie professionnelle altérée… voici venu le temps de la reconstruction, tant physique que morale. Bilan : Quatre ans de cauchemars, environ 100.000 € de perte, et une idée de la nature humaine et de la Justice française peu glorifiante.

Je n’avais qu’à pas être un sale propriétaire !

Les conseils

1) Ne louez pas. C’est tout ! La France s’en émeut ? Qu’elle change son approche de la protection des escrocs en tout genre et de ceux qui usent et abusent des facilités et largesses accordées par l’Etat et la Justice. Qu’elle rééquilibre le pouvoir entre propriétaire et locataire de manière plus équitable. Vendez ou gardez vide.

2) Si vous n’avez vraiment pas le choix et devez louer votre maison, exiger le casier judiciaire (Le locataire peut refuser de vous le donner… pas de problème, trouvez une excuse bidon politiquement acceptable pour refuser le locataire), exiger une caution bancaire d’au minimum un an (Un an de loyer bloqué par la banque du locataire – Cela élimine les jeunes sans trésorerie… tant pis !), ne louer pas au plus de 60 ans car la loi Alur les protègent à partir de 65 ans de manière totalement excessive (Cela élimine les personnes âgées… tant pis !)

3) Les plus grands escrocs sont les plus grands charmeurs…

4) Les faux existent. Non seulement ils trompent, mais ils rendent également multitudes d’actions caduques

5) Au moindre signe de non‐paiement, attendez les deux mois officiels et engagez immédiatement les actions. Je n’ai jamais entendu de cas ou le non‐paiement était solutionné par la patience et la discussion une fois qu’il avait  ommencé… Rien ne sert d’attendre.

6) Suivez les étapes scrupuleusement et dans les règles, et armez‐vous de patience. Posez des questions à votre avocat. Faites jouer vos réseaux. Poussez sans cesse votre huissier…

7) Gardez la Foi et souvenez‐vous que 2016 était l’année de la Miséricorde !